Somewhere in Queens, New York, United States | 2018
Survivor | 2WEI
Aujourd'hui était un grand jour. Un jour qui allait faire date dans ma vie si évidemment je me montrais digne et à la hauteur de la tâche. Après un an et demie à m'accrocher, à m'affirmer, à essayer de me démarquer malgré les tâches ingrates et abaissantes que l'on me confiait, je voyais enfin la lumière au bout du tunnel. J'allais devenir officiellement une membre à part entière du gang des Skulls. Malgré l'insurrection grandissante et le danger vital que cela impliquait de faire partie d'une telle organisation criminelle, je voyais plutôt cela comme une bénédiction après tous les sacrifices que j'avais eu à accomplir pour en arriver là. Impatiente et angoissée à l'idée d'échouer à ma mise à l'épreuve ultime, je m'étais levé très tôt ce matin, avais pris des forces en allant faire un jogging très matinal à Central Park pendant deux heures avant de retourner dans le quartier du Queens, à l'église, et prier pour le salut de mon âme ainsi que la sûreté de mes proches, ma famille de cœur tout en ayant une pensée pour tout ceux qui nous avait quittés trop tôt et qui, malgré le lourd fardeau que représentait leur mort prématuré, avait enfin trouvé la paix. Une fois rentrée à l'appartement, j'avais pris une douche et m'étais bien préparé avant d'allumer quelques bougies prêt du petit autel que
X et moi avions dressés avec des photographies de mes parents, Alejandro, Ana-María et Dean. Même si mon colocataire n'était pas catholique, il avait eu l'idée d'entretenir la mémoire de son meilleur ami partit il y a bientôt un an.
Y quant-à-elle a été dévastée par le chagrin de l'amour de sa vie partit à tout jamais. J'avais bien évidemment été présente pour elle. Nous avions été tous présents pour l'aider à surmonter son deuil immense, sa douleur que certains ne pouvaient qu'imaginer, je la comprenais et fit en sorte d'être autant là pour elle que cette dernière l'avait été pour moi il y a deux années de cela. L'écoutant, la réconfortant, l'aidant à ranger les affaires de son fiancé, à tourner la page et à reprendre progressivement goût à la vie pour la voir de nouveau sourire. Mais ce n'était encore pas évident tous les jours, elle devait encore se battre contre son immense chagrin.
« Qu'est-ce que tu as fait à tes cheveux Aítana? » venant à peine de se réveiller et encore un peu dans le brouillard mon cher colocataire s'était arrêté net tel une statue devant mon changement capillaire radicale, me laissant ainsi apprécier d'une œillade légèrement perverse son torse nu si parfaitement bien dessiné.
Ma longue chevelure brune bouclés arborait à présent de très nombreuses mèches roses sur le dessus. Une partie de moi depuis bien longtemps avait toujours secrètement voulus ce changement radical, encouragée par
Y qui avait elle-même colorée ses pointes blondes de la même couleur, j'avais enfin osée franchir le pas. Un nouveau style pour une nouvelle vie en tant que criminelle.
« Qué? Oh ça?! Tu n'aimes pas? » lui répondis-je avec toute l'innocence dont je pouvais faire preuve en me rapprochant lascivement de lui en triturant une de mes mèches entre mes doigts tout en mordillant ma lèvre inférieur. Réduisant rapidement de moi jusqu'à ce qu'un minuscule espace nous sépare
X fit de même en prenant quelques unes d'entre elles dans sa main tout en ne me quittant guère du regard avant de me susurrer à l'oreille
« Au contraire, tu es resplendissante ma Bonnie ». Mon cœur tambourinait tellement fort dans ma poitrine que je crus un instant qu'il allait exploser, jouant le jeu de la tentation jusqu'au bout je rapprochais dangereusement mon visage du sien
« Bonnie? » l'interrogeais-je alors que nos respirations lentes se mêlaient. Il approcha sa main libre de mon visage, la posant sur ma joue qu'il caressa de son pouce avec ne douceur infinie effleurant presque mes lèvres des siennes
« Si tu arrives à faire tes preuves aujourd'hui nous serons partenaire, Ange et Olympe l'ont décidé. Vus que tu ne cesses de me surnommer Clyde, j'ai décidé que tu seras ma partenaire en tant que Bonnie » la tension sexuelle était palpable et alors que cette dernière atteignais son apothéose il brisa la magie en s'éloignant de moi brisant la magie de l'instant et me laissant frustrée
« Maintenant arrête de m'aguicher, de toute façon ce n'est pas moi qui décide. Faut que j'aille me préparer pour que nous ne soyons pas en retard » ses éclats de rire satisfaits furent accueillis d'un joli doigt d'honneur de ma part tandis qu'il se rendait dans la salle de bain. Depuis que j'avais laissé parler mes sentiments à son égard il y a dix mois de cela alors que j'étais complètement bourré la situation entre nous avait radicalement changé. Certes nous n'en avions guère reparler, mais un petit jeu malsain de séduction s'était mis en place, tentant de nous pousser dans nos propres retranchements. Je ne savais guère où cela allait nous amener, mais je ne pouvais nier ce désir plus qu'affamé pour lui s'emparant de moi jours après jours.
Arrivant enfin au Quartier Général des Skulls, tous semblaient très impatients de voir comment j'allais m'en sortir pour mon premier cambriolage. Oui, c'était ça l'épreuve finale. Je devais organiser et mener à bien mon premier larcin avec un petit groupe pour ainsi prouver ma valeur et mon allégeance. Après plusieurs heures de réflexion, j'avais trouvé ma cible. Lui. Mon ex-amant. Nous allions cambriolé son appartement. Certes c'était plus une vengeance personnelle envers cet avocat qui m'avait souillé pendant près de deux années, mais surtout un avantage. Car même si ce dernier résidait dans l'Upper East Side, je connaissais parfaitement et avec précision les horaires des gardiens, les lieux sans caméra de vidéosurveillance, la valeur de ses biens, la cachette de sa réserve de cash, ses horaires de travail ainsi que le code de son alarme. Il me suffisait juste de me montrer plus maligne que lui en menant la mission à bien. La vengeance était certes un péché, mais à l'instant je ne pensais qu'à cela. Je m'occuperais de redorer mon image et mon intégrité auprès de notre Seigneur plus tard. Je m'étais donc montée une petite équipe seulement composée d'un conducteur et hackeur qui restera non loin de la sortie en nous tenant informer via le contrôle des caméras de surveillance d'éventuels dangers, de
X bien entendu qui était ne l'oublions pas un braqueur expert et enfin d'un des hommes ayant la confiance aveugle d'Ange et d'Olympe. Il leur détaillera tout dans les moindres détails en m'observant minutieusement avant que les deux fondateurs du gang prennent leur décision quant à ma place parmi eux. Angoissée, je me sentais un peu comme sur la chaise électrique. Le dernier jour d'un condamné. Prenant sur moi pour ne rien laisser transparaître, nous revîmes ensemble les derniers détails avant de nous équiper. L'opération se passant en pleine journée était très risquée surtout pour ma première fois, il fallait que tout se déroule à la perfection. Pendant que nous revêtions nos uniformes de gangster, je sentais tout l'encouragement de mon colocataire et acolyte dans son regard, ce qui me rassurait. Prenant deux armes, l'une que je cachais derrière mon dos, l'autre accrochée au plus haut sur ma cuisse, j'espérais sincèrement ne pas avoir à m'en servir. Déjà que tenir en joug une personne m'était insupportable, n'aimant guère tenir le destin d'une vie entre mes mains, alors la prendre aussi facilement d'un seul mouvement de doigt me tétanisait. Vérifiant une dernière fois que tout était prêt et fonctionnel auprès des autres Skulls m'accompagnant, nous montâmes dans le véhicule aux vitres teintés qui avait été modifié avec le logo d'une maison de pâtisserie de luxe pour ne pas attirer l'attention et prîmes la route en direction de mon épreuve finale.
14h00 sonna lorsque nous nous arrêtâmes dans la ruelle extrêmement peu fréquentée. Notre conducteur alluma son PC et commença à jeter un œil aux caméras avant de nous donner son feu vert. Revêtant mon masque squelettique fabriqué par Olympe qu'il avait légèrement customisé à la demande de
X avec des couleurs douces et chaude de mon Cuba natal, nous sortîmes avec nos oreillettes bien placées, nos longs manteaux noirs voilant nos gilets par-balles, armes et sacs. Entrant discrètement par l'entrée de service vide, nous avançâmes à pas de loup guettant le moindre bruit ou mouvement suspect. Je savais qu'à cette heure-ci les cuisines alimentant le reste de l'immeuble étaient abandonnés par le service du midi ne revenant qu'en début de soirée. De plus, il n'y avait aucunes caméras dans ces lieux où seuls des employés mal payés travaillaient. Tout était calme, nous filâmes donc vers l'étroit ascenseur seulement destinés aux serveurs lorsqu'il me fut annoncé que la caméra présente à l'intérieur fut hacké pour qu'au poste de sécurité les agents ne voient qu'un habitacle vide. Durant notre montée jusqu'au trentième étage où se trouvait le fameux penthouse, l'adrénaline montant doucement le long de ma colonne vertébrale d'une façon si exquise que j'en oubliais mon angoisse, de plus la main ganté de
X frôlant la main dans une étreinte réconfortante discrète m’insufflait encore plus de confiance. Quelques secondes avant que nous arrivions, notre coéquipier hackeur me certifia qu'il venait tout juste de s'occuper de vérifier les aller et venus, tout était bon. Atterrissant directement dans l'appartement toujours aussi blanc et sans vie de mon ancien amant, je ne pris guère le temps de savourer cette petite réussite car je me dépêchais d'inscrire le code pour éviter que l'alarme ne se déclenche en priant pour qu'il ne l'est pas changé. Fort heureusement, non. Heureuse et soulagée de voir que tout se déroulait comme prévus, j'indiquai à
X de se rendre dans le bureau, de prendre la clé se trouvant sous la première page du livre posé à gauche permettant ainsi d'ouvrir sans trace d’effraction le coffre-fort planqué derrière le tableau abstrait d'un certain Picasso. Oui c'était cliché, mais je n'y pouvais rien si mon ancien avocat n'avait aucune imagination et surtout ne s'était à l'époque pas méfier de moi me laissant voir ses plus sombres secrets qui étaient à présent mes meilleurs alliés. Pendant que Clyde était à l’œuvre, je me dirigeais avec mon autre acolyte ne me lâchant guère du regard et semblant analyser tous mes faits et gestes vers le dressing où nous récupérâmes l'intégralité de la collection impressionnante de montres de luxe qu'il possédait qui se revendaient à prix d'or au marché noir ainsi que de nombreux tableau et œuvre d'art. Dépouillant ce qui pouvait entrer dans nos sacs il ne nous fallut qu'une petite quinzaine de minutes avant de prendre la direction de la sortie.
Malheureusement le petit ascenseur de service ne pouvait pas tous nous contenir
« Prenez la marchandise avec vous et rejoignez la voiture » leur dis-je en le donnant tout le butin et à leur grande surprise mon masque, mes armes ainsi que mon manteau
« Mais Bonnie que vas-tu faire? » me questionna
X prit de cours par ma décision et semblant s'inquiéter pour moi. L'autre Skull semblait m'observer avec attention, voulant lui aussi connaître mon plan de dernière minute qu'honnêtement j'allais improviser.
« Nous ne devons pas traîner, descendez, je vé prendre l’ascenseur privé et sortir par la grande puerta, l'on se retrouve d'ici una dizaine dé minutos à l'angle » décidais-je sous les regards surpris de mes acolytes. Nous n'avions guère le choix, il fallait que l'on se dépêche de sortir, ils allaient mettre les biens volés en sécurité tandis que j'allais me mettre en danger pour sortir. Détachant ma longue chevelure à présent rose, je leur tournais le dos au moment où la porte se referma sur eux
« Il né reste plus toi et moi, guide moi » dis-je dans l'oreillette en soufflant un grand coup lorsque je pris l’ascenseur me menant droit à la véritable entrée de cet immeuble bien gardé. Le hackeur m'expliqua l'emplacement de certaines caméras de surveillance pour m'éviter de montrer mon visage en utilisant mes cheveux pour que personne ne me reconnaisse et me certifia la présence seule du portier au rez-de-chaussée. Priant silencieusement lors de ma descente, je mis en place le camouflage rose dès que je fus arrivée en bas et me comportais naturellement, comme si je connaissais les lieux pour ne pas attirer l'attention. L'employé m'ouvrit la porte tel un automate
« Bonne journée madame », je pris sur moi pour ne pas le remercier car je doute que les grandes fortunes ne se soucient du petit peuple. Respirant doucement, je m'éloignais tranquillement du lieu du vol et rejoignis avec la tête haute mes acolytes dans la camionnette comme si de rien n'était.
« Tu as fait preuve d'un sacré culot! » m'accueillis Clyde encore sous le choc
« Surtout d'une prise d’initiative risquée et dangereuse » continua le Skull qui était en charge de me surveiller, je déglutis difficilement face à la froideur de ses propos. Avais-je échouée même si la mission était une réussite?
« Mais tu t'es mise en danger pour nous permettre de repartir avec la marchandise, j'aime ton esprit d'équipe et ton sens du sacrifice » termina-t-il d'un faible sourire qui me rassura aussitôt. Cette fois-ci j'en étais certaine, ma tâche finale avait été couronnée de succès et j'allais enfin devenir une véritable membre du gang des Skulls!